"Die lange Nacht der Detektive", par Urs Widmer, fut publié en Allemagne aux éditions Diogenes. Il porte le n°39/II de la collection Diogenes Taschenbuch et fut édité en 1973.
Le titre complet de cette pièce de théâtre est
Une longue préface, très détaillée, ouvre cet ouvrage. L
y parle de ses influences, allant de Harry Dickson à Philip Marlowe, en passant par Auguste Dupin, Nick Carter, Jim Strong et d'autres encore...Urs Widmer y dévoile aussi les "clefs" de sa pièce, indiquant les noms des personnages qu'il a empruntés pour construire son intrigue.
Les pseudonymes utilisés sont, même sans ces informations, bien transparents.
En voici la liste :
Shylock Hoames = Sherlock Holmes
Dr. Hudson = Dr. Watson
Paul Maigré = Jules Maigret
Miss Mupple = Miss Marple
Hero Woolfe = Nero Wolfe
Arsène Lupinescu = Arsène Lupin
Jerry Corton = Jerry Cotton (un personnage très connu en Allemagne)
Et tout ce beau monde s'est donné rendez-vous au... 222b Baker Street !
Cet ouvrage fut réédité en 1988 chez Verlag der Autoren.
La pièce fut également reprise de février à mars 2013 :
Photographie extraite d'un article paru dans le Ausburger Allgemeine :
En 1972, sous le titre "Die Katzen des Doktor Watson". Diffusé sur WDR.
Un titre réutilisé pour la seule trace de traduction française trouvée : "Les chats du Docteur Watson", traduit par France Culture en 1975.
Mais s'agit-il de la traduction du texte de la pièce de théâtre ou de celui de l'adaptation radiophonique ? Pas d'information à ce sujet pour le moment...
En 1974, sous le titre "Die lange Nacht der Detektive". Diffusé sur ORF.
Cette dernière version a été rediffusée le 25 mai 2013 sur Phonostar.
"Urs Widmer à la Comédie de Bâle", par Guy Curdy, est une critique de la pièce de théâtre qui fut publiée dans le journal Le Matin - Tribune n°353 du 19 décembre 1973 :
Deuxième création de la saison à la Comédie de Bâle : « La longue nuit des détectives. » Il ne s'agit pas cette fois de la pièce d'un auteur maison, c'est-à-dire d'un auteur engagé par les théâtrales de Bâle, comme l'est Heinrich Henkell, mais d'un jeune Bâlois qui est présentement domicilié à Francfort. Urs Widmer : 35 ans, Dr ès lettres, écrivain, essayiste, professeur, dramaturge. Il a déjà écrit plusieurs pièces radiophoniques pour les émetteurs allemands, mais c'est sa première œuvre théâtrale.
Widmer a imaginé la rencontre des plus célèbres détectives de la littérature policière.
A l'occasion de ses 80 ans, Sherlock Holmes reçoit ses amis au 221 b de la Baker Street : Maigret, Miss Marple, Nero Wolfe, ainsi que le Dr Watson, son médecin personnel, et Arsène Lupin.
Les immortels ont vieilli. Ils sont tous un peu gâteux : Miss Marple boit ; Maigret est sourd ; Nero Wolfe se déplace en chaise roulante. Ils vivent dans le passé et se racontent leurs exploits. Toujours les mêmes : ils les savent tous par cœur. Comme chaque année en la circonstance, Sherlock Holmes lit le récit de l'affaire policière la plus extraordinaire qu'il ait démêlée : le mystère du poignard empoisonné ou la longue nuit des détectives.
C'est ennuyeux. Chacun fait semblant d'écouter en pensant à ses propres réussites.
Et dans cette réunion de détectives classiques qui se répète tous les ans, arrive un inconnu. Un détective moderne : Jerry Cotton qui leur en met plein la vue avec sa compagne aguichante, avec ses sept passeports, ses coupures de monnaie de tous les pays, ses revolvers sous le veston, son manteau de pluie, son chapeau mou. Il fait un numéro de bravoure qui n'impressionne pas longtemps les vieux détectives.
Sherlock Holmes reprend la lecture de son récit. Jerry Cotton s'assied dans un coin.
Subitement, il tombe. Le Dr Watson se précipite pour lui porter secours, Mais il est mort, un poignard empoisonné dans le dos. Qui est l'assassin ? A minuit, on décide d'aller se coucher, chacun se retire dans sa chambre, C'est à ce moment-là que Sherlock Holmes est assassiné. Nero Wolfe qui revient dans le salon chercher sa valise qu'il avait oubliée, le découvre étendu sur le tapis.
En réalité, Sherlock Holmes n'est pas mort : avec l'aide de Nero Wolfe, il n'a fait que passer ses habits au cadavre de Jerry Cotton : une affaire policière pour détectives célèbres.
Après cette représentation, je ne sais pas si le spectateur a le sentiment d'avoir assisté à l'avènement d'un nouveau dramaturge. Urs Widmer a une dialectique très aisée et son idée d'opposer au détective classique qui arrête à coup sûr les meurtriers, le tueur cynique qu'est souvent le détective moderne (Jerry Cotton, James Bond) est certainement très originale. En outre, Sherlock Holmes et Jerry Cotton agissent tous deux au nom de la morale officielle : ils sont en accord avec la société. Ils sont les serviteurs de l'ordre. Mais cette morale et cet ordre n'ont apparemment pas les mêmes exigences. Il y a eu une évolution.
Il lui faut du temps pour exposer ses intentions. L'action traîne, lourde et lente, jusqu'à l'assassinat de Jerry Cotton. Beaucoup de lecture et peu de théâtre. La mise en scène de Niels-Peter Rudolph n'est pas très vive non plus. De sorte que le public doit attendre longtemps pour saisir l'intention et le fil conducteur. Widmer présume aussi que chacun connaît Sherlock Holmes, Maigret, Miss Marple, Nero Wolfe, Arsène Lupin, leur caractère et leurs manies : ce qui n'est certainement pas le cas.
L'auteur a du talent et sa pièce a des qualités. Les qualités de la pièce n'ont peut-être pas été très bien, mises en valeur. Quant au talent, il faudra qu'il se manifeste dans une autre œuvre qui ne saurait tarder.
Guy Curdy
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