La fantaisie fantaisiste "A travers les Ages", de L. Cosso-Gentil, fut publiée dans Le Glaneur (non, il ne manque aucune lettre !) n°87 du 9 novembre 1908.
L'auteur est fortement soupçonné d'avoir (ab)usé de substances prohibées !
Comme tout le monde le sait, l'humanité connut différentes époques que l'on appela âges. Entre autres, pour ne citer que les plus connus : l'âge de Pierre, l'âge des Reins, de Fer, etc... Ce sont ces âges que je vais analyser l'un après l'autre si vous voulez bien m'accorder un instant d'attention.
Comme il est généralement convenu en pareil cas, commençons par... le commencement — pardon ! par l'âge de Pierre (on est prié de ne point confondre pierre, nom commun féminin singulier, avec Pierre, nom propre, masculin, sans nombre).
L'humanité n'est pas très documentée sur ce point, c'est peut-être à cette époque, très reculée, que nous devons la gravelle et autres maladies similaires. Étant en train de faire des études à ce sujet, sur moi-même — les grands savants ne font des expériences que sur eux-mêmes — je vous en communiquerai le compte-rendu aussitôt le résultat connu.
Passons à l'âge d'Airain — C'est en ce temps-là, disait Jésus-Christ à ses disciples... pardon, excusez-moi ! c'est en ce temps-là que l'on commença à statufier les musiciens, académiciens, pharmaciens, mécaniciens, plébéiens, praticiens, médeci...ens, et tout un tas de rimes en ien. Cette époque dure encore et ne se terminera que quand l'avenir : « ce gendarme de Dieu » donnera, à toutes les statues, un grand coup de botte dans l'aira in.
L'âge de fer vient ensuite. A ce moment, on inventa les chemins de... fer, les ponts en... fer, le fil de... fer, la charpente en... fer, la bonne à tout... fer, etc., etc... On découvrit même, nous assure-t-on, le fer... à friser et le fer... à repasser, dont on peut voir les squelettes fossiles à l'exposition franco-anglaise de Londres (casier numéro 3, stalle numéro 4, salle numéro 5, pavillon numéro 6, avenue numéro 7, — s'en rapporter aux plans).
L'âge de la Femme. — Ah ! l'âge de la femme ! C'est l'âge inconnu. C'est l'âge avoué, plus les mois de nourrice (de Marseille) ; c'est l'âge qu'un ironiste célèbre — M. Fallières — dénomma l'âge anonyme (publié sous toutes réserves).
L'âge de l'Automobile. — A ce moment commença la plus grande des calamités, calamité que quelques savants : docteurs aliénistes et rabiques, entre autres, appelèrent avec juste (?) raison : « l'âge de l’Écrasement Intensif ». (Ne pas confondre ce procédé avec celui de la culture intensive).
Puis enfin, vient l'âge des Aviateurs. Ce dernier âge est fort curieux et tend à prouver que l'aviateur... n'attend pas le nombre des années.
Mais le plus curieux de cela, c'est que cet âge était connu bien avant qu'un aéroplane ait tenu l'atmosphère. En effet, n'avez-vous pas depuis longtemps, ainsi que moi, plané dans les nuages ?...
Eh ! bien...
Il n'y a pas à dire, je suis souffrant, je m'en vais à Paris pour me faire soigner. Je rentrerai à l'hôpital Saint-Ane (Sainte-Anne). Je vous enverrai de mes nouvelles.
L. COSSO-GENTIL.
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