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Amicale des Amateurs de Nids à Poussière

Amicale des Amateurs de Nids à Poussière

Le Blog de l'Amicale Des Amateurs de Nids À Poussière (A.D.A.N.A.P.) est un lieu de perdition dans lequel nous présentons revues, vieux papiers, journaux, ouvrages anciens ou récents, qui s'empilent un peu partout, avec un seul objectif : PARTAGER !

Publié le par Fabrice Mundzik
Publié dans : #Lune, #Astronautique, #Espace, #Savant, #Experiences, #Henry Franker, #Otto Schelt, #Jules Verne, #Mon Camarade, #Feuille d'Avis de Neuchâtel

Le texte qui va suivre fut publié à, au moins, trois reprises, sous des titres différents.

Si le fond et les noms des personnages restent identique, la forme fut fortement remaniée.

Un bel exercice de réécriture ! (Qui a dit plagiat...?!)

Précisons que l'existence d'autres versions, antérieures ou non, n'est pas exclue.

C'est en Suisse que l'on retrouve les plus anciennes parutions connues à ce jour : dans la Feuille d'Avis de Neuchâtel du 3 décembre 1936 et le Journal et feuille d'avis du Valais du 22 décembre 1936.

Édité sous le titre « Une extraordinaire aventure. Un homme vit-il dans la lune depuis quarante ans ? », il n'est ni signé, ni illustré.

 

Une extraordinaire aventure.

Un homme vit-il dans la lune depuis quarante ans ?

 

Dans les profondeurs d'une forêt située près de Rastenbourg, dans la Prusse Orientale, un certain nombre de personnes étaient réunies en 1896, autour d'un curieux engin ressemblant à un canon, placé dans une dépression creusée dans la terre.

Il faisait nuit, une nuit de pleine lune. Soudain, un homme quitta le groupe et commença à parler aux assistants.

« Mes amis, fit l'homme qui s'appelait Henry Franker, vous allez assister au dernier stage d'une grande expérience, à laquelle j'ai consacré douze années de ma vie. Si elle réussit, la fusée que j'ai placée dans le canon atterrira à la surface de la lune. Sinon elle reviendra sur la terre et causera de grands dommages. Mais je n'anticipe pas un échec ».

Puis Franker s'approcha d'une boîte carrée, qui était rattachée au canon par plusieurs câbles. Franker approcha sa main d'un bouton et tourna la tête vers le canon. Son doigt pressa le bouton. Il se produisit un éclair bleu, accompagné d'un grondement qui semblait provenir des entrailles de la terre. Puis, l'instant d'après, l'écho d'une détonation fut entendu, qui semblait venir de très loin. « J'ai réussi ! » cria Franker.

En moins d'une semaine, il se fit décerner des brevets pour son engin. Mais les savants allemands demeurèrent sceptiques. On avait déjà connu de nombreux maniaques de la fusée et on les avait toujours considérés comme des charlatans de la science. En cette année 1896, il était convenu, dans les milieux scientifiques, qu'il était impossible de placer dans une seule fusée, la force motrice nécessaire pour lui faire surmonter la puissance d'attraction de la terre. Ainsi disaient les savants. Mais ils ne réussirent pas à refroidir le zèle de Franker. Celui-ci avait acquis une grande renommée par ses travaux sur les explosifs à haute puissance, travaux qui avaient abouti à la découverte d'un explosif plus puissant que le T.N.T. Par la suite, ayant dirigé son attention sur les phénomènes électriques, il était devenu une autorité reconnue, en la matière.

Franker avait mis à profit dans la préparation de son canon-fusée, toutes ses connaissances tant sur l'électricité que sur les explosifs, car il était d'avis que les autres inventeurs de fusées avaient échoué uniquement parce qu'ils avaient concentré dans la fusée toute la puissance motrice. Dans sa propre fusée, l'élan initial provenait du canon, tandis que la fusée se projetait en avant, par une série continue d'explosions, se produisant après un laps de temps convenable.

Convaincu du succès de sa première expérience, Franker se mit au travail pour construire un canon et une fusée capables de transporter deux hommes. Il avait l'intention, déclara-t-il, de voyager jusqu'à la lune et de se faire accompagner par un jeune savant prussien du nom d'Otto Schelt.

A ceux qui lui demandaient ce qu'il allait faire une fois arrivé dans la lune, Franker expliqua d'un air très confiant, qu'il se proposait de revenir. La puissance d'attraction de la lune, expliqua-t-il, étant relativement restreinte, il n'y aurait pas besoin d'un canon projecteur. La fusée se lancerai, par sa propre force et irait de l'avant sous l'impulsion de ses explosions.

Franker prépara également un énorme parachute qui était destiné à briser à point l'élan de la fusée vers la terre, et il déclara que la seule circonstance pour laquelle il ne pouvait pas répondre, était la chute de la fusée dans l'océan.

Un jour du début de l'année 1897, tout se trouva prêt pour tenter la grande expérience. Le canon, beaucoup plus grand cette fois-ci, fut mis en position, la fusée logée dans sa gueule. Peu avant minuit, Franker, Schelt et quelques amis se dirigèrent vers la clairière où on avait installé l'engin, portant avec eux un certain nombre de tubes cylindriques contenant de l'oxygène.

Les cylindres furent mis dans le corps de la fusée, les hommes se serrèrent la main. Franker riait, ne manifestant aucun signe de nervosité ; Schelt, par contre, était pâle et silencieux, mais ne semblait nullement regretter son geste, car quelques minutes auparavant il avait signé une déclaration comme quoi il accompagnait Franker volontairement et sur sa propre demande. Vint le moment du départ. Les deux hommes se hissèrent dans la gueule du canon et franchirent la porte de fer de la fusée. Un dernier signe d'adieu et la porte se referma, les assistants s'éloignèrent quelque peu. Une pause d'une minute. Un doigt pressa sur un bouton. Il y eut un grognement effrayant, un éclair de feu déchira l'air. Puis à nouveau, comme l'autre fois, un petit craquement, comme produit par une détonation éloignée, provint de très loin.

...Et on n'apprit plus rien sur le compte d'Henry Franker et d'Otto Schelt. Aucune trace d'eux ne fut retrouvée. Aucun éclat de métal ne put être identifié comme faisant partie de la « fusée de la lune ».

Que leur arriva-t-il ? Atteignirent-ils la lune ? Si oui, furent-ils incapables de revenir ? Tombèrent-ils dans les profondeurs de l'Atlantique ou du Pacifique, ou leur fusée éclata-t-elle en morceaux quelque part dans l'espace ?

Autant de questions auxquelles il est impossible de fournir la moindre réponse.

...Dans les papiers qu'avait laissé Franker, on trouva des notes écrites de sa main, où il ne cachait pas la certitude qu'il avait de ne plus revoir la terre. Mais il exprimait l'espoir que son exemple guiderait et inciterait d'autres à poursuivre ses expériences au point où il les avait laissées.

* * *

Anonyme - Un homme vit-il dans la lune depuis quarante ans ? (1936)

Passons la frontière suisse, pour nous rendre en France !

« Une extraordinaire aventure. Un homme vit-il dans la lune depuis quarante ans ? » est devenu « Deux hommes dans la lune ? » et est signé Bour.

Publié dans dans Mon Camarade du 4 mars 1937, il est accompagné d'une illustration.

 

Deux hommes dans la lune ?

 

Quand Marcel, au lieu d'apprendre ses leçons, suce le bout de son porte-plume, et rêve en regardant le plafond, son maître lui dit : « Eh bien, mon garçon, es-tu dans la lune ? » Pourquoi cette comparaison ? Est-ce que, en dehors de Jules Verne, quelqu'un peut bien imaginer un voyage dans la lune ? Cela me fait froid dans le dos rien que d'y penser. Et vous ?

Pourtant, écoutez cette aventure, à peine croyable...

Cela se passe en Allemagne, près de Rastenbourg, une certaine nuit de 1896. Un homme conduit secrètement un groupe d'amis dans une forêt jusqu'à une clairière. Il fait nuit de pleine lune et les spectateurs voient au centre de la clairière la bouche luisante d'un canon enfoncé dans la terre. Alors, l'homme, qui s'appelait Henry Franker, adresse la parole aux autres : « Mes amis, leur dit-il, je veux procéder devant vous à une expérience d'une haute portée scientifique. J'ai passé douze ans à la mettre au point. Si cette expérience réussit, la fusée que j'ai placée dans ce canon atteindra la lune, sinon elle retombera sur la terre et y explosera. Mais, ajoute-t-il en souriant, je compte qu'elle réussira ! » Et Franker s'approche du canon, appuie sur un bouton : il se produit un bruit profond accompagné d'un jet de flamme. Puis l'inventeur tend l'oreille, et tous les assistants entendent alors une nouvelle explosion très loin dans le ciel. « J'ai réussi ! » crie l'inventeur...

Il ne s'agit pas d'un fou. Franker est un ingénieur réputé qui s'est occupé d'électricité et a fait quelques découvertes retentissantes en matière d'explosifs. Il fait breveter son engin. Les quelques savants allemands qui en eurent connaissance haussaient les épaules : « Il est prouvé, proclamaient-ils, qu'il est impossible de placer dans une fusée une force motrice suffisante pour lui faire dominer la force d'attraction de la terre (la pesanteur). Mais Franker estime qu'il est le premier à avoir combiné le canon et la fusée : le canon va jeter la fusée bien haut dans l'espace comme un simple obus avant que la fusée ne commence la série de ses propres explosions ; tandis que les autres « maniaques de la fusée » aboutissaient à un échec parce qu'ils faisaient partir la fusée par ses propres moyens depuis la surface de la terre.

Convaincu du succès, Franker se remet au travail ; il veut perfectionner son invention et construire une fusée assez grande pour que deux hommes puissent y prendre place. Au bout de quelques mois, il avait convaincu un jeune savant prussien, Otto Schelt, de l'accompagner. A ceux qui lui demandaient en plaisantant ce qu'il ferait une fois arrivé dans la lune, Franker répondait qu'il avait l'intention d'en repartir aussitôt, et que le voyage de retour serait beaucoup plus facile car l'attraction de la lune est bien moindre que celle de la terre (c'est tout à fait exact), et la fusée cette fois-là n'aurait plus besoin d'un canon pour la projeter : elle se propagerait uniquement par ses propres moyens. Le seul risque sérieux, avouait-il, car il ne mettait pas en doute la réussite de cet aller et retour, serait que la fusée « rate » incontinent et tombe dans la mer...

Un an plus tard, en 1897, a lieu une nouvelle promenade nocturne dans la forêt. Cette fois-ci c'est plus sérieux. Franker et Schelt portent des tubes d'oxygène, quelques instruments, des provisions, et, plié, un grand parachute destiné à freiner l'arrivée. Parvenus à la clairière, ils inspectent l'énorme fusée, y rangent leurs colis, se serrent la main. Franker riait, très maître de lui, mais Schelt était grave, un peu pâle ; il avait laissé un testament expliquant qu'il avait insisté pour accompagner Franker. Puis la fusée est mise en place, les deux hommes y pénètrent, font un signe d'adieu et vissent sur eux la porte de fer. Les assistants s'éloignent ; à l'heure fixée un doigt presse un bouton. Et c'est l'énorme explosion ; ensuite, comme l'autre fois, une deuxième explosion très lointaine.

...Depuis lors on n'entendit plus parler des deux Allemands Henry Franker et Otto Schelt. Aucune trace, aucun morceau de métal, ne permet d'affirmer que la « fusée de la lune » s'est broyée sur la terre.

Atteignirent-ils la lune ? Dans ce cas, à moins d'un retour immédiat, ils étaient condamnés à mort. La lune est peut-être accessible : moins de 400,000 kilomètres de distance, à la vitesse de 500 kilomètres à l'heure, cela fait un mois de voyage. Mais la lune est inhabitable : il n'y a pas d'eau, donc pas de végétation ; l'air y est extrêmement raréfié, il faudrait y circuler avec des appareils à oxygène comparables à ceux des aviateurs tentant des records d'altitude. Il est vrai que la lune est cinquante fois moins grosse que la terre ; on en ferait assez vite le tour, d'autant plus que la pesanteur est là-bas tellement moindre que l'homme pourrait battre tous les records de saut et de course !

Malgré ces avantages et ces précautions, l'homme ne pourrait pas rester, fût-ce, quelques instants, sur ce globe. En effet, nous avons dit qu'il n'y avait pour ainsi dire pas d'air, d'atmosphère : on peut donc être certain qu'on y brûle le jour et qu'on y gèle la nuit ; ici, sur la terre, la couche d'air « forme matelas », absorbant, le jour, une bonne partie de la chaleur solaire qu'elle communique pendant la nuit à la terre, s'opposant au trop brusque refroidissement de celle-ci. D'ailleurs la visite de la lune manquerait d'agrément : c'est un désert au sol crevassé, troué d'énormes volcans. Tout ce qui fait ici le charme d'un paysage, indépendamment des arbres, des fleurs, des animaux, des hommes, des maisons, — le charme d'un paysage de haute montagne par exemple, — tient à un certain décor et de couleur que donne « le ciel », c'est-à-dire ce mélange d'air et de vapeur d'eau qui constitue l'atmosphère ; ce qui fait le bleu du « ciel », c'est l'épaisseur de l'air ; ce qui fait la différence des « plans » et pâlit les lointains par rapport aux lieux proches, c'est la brume. Pas d'atmosphère sur la lune : le ciel est donc toujours noir, même quand rayonne le soleil, c'est un grand rideau noir piqué d'étoiles où flambe le globe du soleil et où la terre roule comme une lune énorme. Tout y est découpé en lumières et ombres crues.

Franker avait laissé des note où il annonçait qu'il pensait ne plus revoir la terre. Mais il disait qu'il voulait donner ainsi l'exemple aux savants futurs et qu'il fallait continuer ses expériences.

Mes amis, croyez-moi, il vaut mieux être « dans la lune » : sur sa chaise !

Bour.

* * *

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