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Amicale des Amateurs de Nids à Poussière

Amicale des Amateurs de Nids à Poussière

Le Blog de l'Amicale Des Amateurs de Nids À Poussière (A.D.A.N.A.P.) est un lieu de perdition dans lequel nous présentons revues, vieux papiers, journaux, ouvrages anciens ou récents, qui s'empilent un peu partout, avec un seul objectif : PARTAGER !

Publié le par Fabrice Mundzik
Publié dans : #Henri Géroule, #L'Œuvre, #Mars, #Saturne, #Mercure, #Jupiter, #Astronomie, #Vénus, #Camille Flammarion, #Humour, #Halley, #Synergie, #Bibliogs

« C'était hier la fin du monde », d'Henri Géroule, est paru dans L'Œuvre du 18 décembre 1919.

C'était hier la fin du monde

L'étranger s'est montré beaucoup plus ému que Paris qui ne le fut guère.

C'était hier la fin du monde et les historiens du siècle noteront qu'elle s'est aussi bien passée que celle qui eut lieu en 1911, alors que la comète de Halley, en effleurant la terre de sa queue, devait précipiter l'univers dans le néant.

Nous voilà donc heureux de nous retrouver vivants et cette fin du monde une fois de plus manquée va surtout marquer la fin de la carrière de l'astronome sud-américain qui n'a pas craint d'annoncer qu'une quintuple et formidable collision entre Vénus, Mars, Saturne, Mercure et Jupiter allait entraîner une catastrophe cosmique, sans précédent ; c'est bien le cas de le dire...

J'avoue que, pour ma part, la prédiction de cet astronome m'avait laissé quelque peu sceptique : un astronome sud-américain, ça n'a pas l'air très sérieux. Parlez-moi des astronomes français comme Leverrier, par exemple, qui, comme chacun sait, découvrait des planètes tout en étant aveugle-né. Ah ! si un savant de cette envergure nous avait prédit la fin du monde ! L'inquiétude nous aurait gagnés et, mettant en pratique le conseil impérieux de l’Évangile, quand il nous entretient de l'époque où régnera « l'abomination de la désolation », nous nous serions enfuis dans les montagnes, sans essayer de revenir en arrière pour emporter nos vêtements, bien qu'ils soient hors de prix.

M. Camille Flammarion était tranquille.

— Et vous aviez raison de ne rien craindre, nous a déclaré M. Camille Flammarion. La position actuelle des planètes ne peut amener aucun cataclysme. Le rapprochement de Mars et de Vénus, qui firent plutôt jadis mauvais ménage, de Jupiter, de Saturne, dans la même région du ciel, d'un même coté du soleil, ne comporte aucune menace astronomique.

— C'est bien ce que je pensais. Ce Sud-Américain n'y connaît rien.

— Je ne discute pas sa valeur scientifique, mais ses déductions n'ont aucun sens, aucune valeur. C'est du roman.

— Ont-elles causé dans le public une grosse émotion ?

— En France, je ne crois pas ; mais à l'étranger c'est autre chose. En Italie et en Portugal, le bluff de l'astronome étranger a, en maints endroits, été pris au sérieux. Nous avons reçu, à la Société astronomique de France, un grand nombre de lettres dont les signataires nous exprimaient les craintes les plus vives. C'est ainsi qu'un certain nombre d'habitants de Porto ont prié un jeune homme de m'écrire, en leur nom, pour me demander « si vraiment il y avait quelque péril pour la terre » !

Une brave Suissesse, de son côté, me supplie de lui indiquer « à quel endroit à peu près commencera la catastrophe pour qu'elle ait le temps d'aller ailleurs chercher un refuge ».

Son valet de chambre aussi

Au moment où je venais de quitter son éminent et sympathique maître, le valet de chambre de M. Camille Flammarion voulut bien me fournir sur l'émotion produite, sinon dans tous les quartiers de Paris, du moins dans celui de l'Observatoire, par la nouvelle de la fin du monde, quelques précieux renseignements :

— Vous comprenez, me dit-il, quand on me voyait au marché ces jours-ci, tout le monde me demandait : « Eh bien ! qu'est-ce qui va se passer ? Racontez-nous ça, car vous êtes bien placé pour avoir des renseignements. » Alors, bien entendu, j'ai dit qu'il n'y avait pas de danger.

— Mais est-ce qu'on avait peur ?

— Ma foi non. Il n'y a qu'à la poste. Ces demoiselles avaient un peu le trac. Là aussi, je suis intervenu et je les ai rassurées.

Les renseignements du valet de chambre de M. Camille Flammarion peuvent s'appliquer à tout Paris. On n'a pas vu, dans les églises, des foules prosternées et abîmées dans la prière et, mardi soir, théâtres, cafés-concerts et dancings n'ont pas vu diminuer leurs recettes.

Bibliogs / A.D.A.N.A.P. : Synergie !

 

Henri Géroule - C'était hier la fin du monde (1919)

Henri Géroule - C'était hier la fin du monde (1919)

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