« Qui a télégraphié ? Vénus ou Mars ? », de Vetter, est paru dans L'Est républicain du 26 décembre 1921.
Qui a télégraphié ? Vénus ou Mars ?
En février 1920, le Daily Mail annonçait que des opérateurs australiens de T.S.F. avaient reçu des trains d'ondes de 80 à 120 kilomètres, avec répétition fréquente des trois signes des lettres G ou S.
Cet automne, Marconi et plusieurs ingénieurs ont enregistré des ondes régulières d'une longueur d'onde de 150 kilomètres, au cours d'un voyage dans la Méditerranée. Or, les plus grandes longueurs d'ondes des stations d’émissions terrestres ne dépassent pas 15 à 20 kilomètres. Les partisans des communications interplanétaires se sont empressés de conclure que les Martiens essayaient d'entrer en conversation avec nous.
Ces ondes peuvent provenir du Soleil. Les éruptions, explosions d'une violence indescriptible dont cet astre flamboyant est le siège, peuvent certainement influencer aussi l'aiguille aimantée et provoquer les aurores boréales. Mais ou le fait se complique, c'est lorsque ces ondes sont régulières ; elles sont donc le fruit d'une pensée et d'une volonté.
Le vide de l'espace n'est pas un obstacle a la transmission des ondes ; c'est tout le contraire, et si l'on plaçait sur Mars des appareils récepteurs analogues aux nôtres, les télégrammes de nos puissantes stations y seraient probablement perçus.
L'astre le plus rapproché de nous est la Lune, mais l'absence d'air et les variations de température n'y permettent pas une existence comparable à la nôtre. D'ailleurs les plus puissants instruments n'ont pas permis d'y distinguer les effets quelconques d'une civilisation.
En partant du Soleil, Vénus, la Terre et Mars sont les 2e, 3e et 4e planètes du système solaire. Or, dans certains cas, comme en avril dernier, la distance de Venus n'est plus que de 40 millions de kilomètres, et les Vénusiens, s'ils nous ressemblent, peuvent nous observer fort bien dans leur ciel de minuit... Mais c'est à ce moment que nous les voyons le plus mal, puisque la planète nous semble voisine du Soleil.
Mars est plus éloigné (minimum 56 millions de kilomètres en 1924), mais nous le voyons beaucoup mieux : un curieux réseau de canaux paraît distribuer l'eau d'océans peu profonds à des terrains très mal arrosés ; d'autre part, on nous voit fort mal de là-bas. En outre, l'automne dernier, la planète Mars était dans la même direction que Vénus, mais deux fois plus loin. En 1922, Mars sera beaucoup mieux placé. Ses années durent le double des nôtres ; pour les astronomes, 1922, 1924 seront des années martiennes, 1921, 1923 sont des années non-martiennes, peu favorables aux observations, comme aux communications télégraphiques.
Nous connaissons peu de chose de Vénus, sinon qu'elle a une atmosphère très nuageuse, empêchant souvent de voir les détails de la surface. On ne sait pas encore si elle montre toujours la même face au Soleil, comme l'a déclaré Schiaparelli, le même qui découvrit à Milan les canaux martiens, ou si sera confirmée la récente observation de Pickering, un des as de l'astronomie américaine, conduisant à une rotation en 68 heures. Dans le second cas, Vénus serait habitable, ce qui ne prouve pas qu'il y ait là-bas des êtres plus ou moins intelligents munis d'appareils de T.S.F. Il y aurait des probabilités pour qu'elle en soit à l'époque secondaire ou tertiaire de nos périodes géologiques, comme la Terre il y a 10 millions d'années ; de gigantesques sauriens étaient alors les maîtres ; en appuyant ses pattes contre une façade, l'un de ces reptiles aurait pu manger au balcon d'un 5e étage !
Il y a des probabilités analogues pour que Mars soit plus avancé que nous et que les ingénieurs martiens aient essayé, il y a cent mille ans au moins, de nous adresser des appels auxquels nous étions, anthropoïdes, encore bien incapables de répondre. Ils auront fini par se lasser.
Ce n'est pas seulement de Vénus ou de Mars que des appels pourraient nous être adressés. La petite planète Éros s'est approchée de nous en septembre à moins de 100 millions de kilomètres, tandis que Vénus était 2 fois plus loin, Mars 4 fois plus. Cet astéroïde n'est probablement pas le seul dans ce cas.
Dons, attardons que cela se renouvelle. Une dernière objection peut être faite. N'y a-t-il aucune machine électrique terrestre susceptible de lancer des trains d'ondes réguliers, sans qu'on le veuille, dans certaines circonstances à examiner ? Ne pourrait-on être en présence d'une force naturelle inconnue, ou d'un phénomène de hantise ? L'avenir nous l'apprendra.
Le jour où nous entrerions en communication avec les êtres de l'espace marquerait une date fondamentale dans l'histoire des progrès de l'humanité. Souhaitons qu'elle ne se fasse pas attendre.
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