"Jusqu'où ira la folie des hommes ? L'infernal « Rayon de la mort » va naître dans les laboratoires" par Lucien Barnier in Pilote n°35 du 23 juin 1960, deuxième année. Les illustrations sont de Jor Dom.
Le rayon de la mort est-il sur le point d'entrer dans l'arsenal de la stratégie moderne ? Il semble bien, effectivement, que les savants soient près de découvrir cette arme terrifiante. Aux États-Unis, le sénateur Dodd évoque clairement un certain « flot de neutrons qui tuerait des dizaines de millions d'êtres humains sans détruire aucune installation industrielle ». Avec cette arme, l'ennemi serait décimé, mais ses villes et ses usines tomberaient intactes entre les mains du vainqueur. Le journal britannique « Evening Standard » fait allusion à un faisceau invisible qui tue, volatilise et ne laisse aucune trace. À Moscou, le professeur Babat met au point une « foudre artificielle » qui éclate au point de rencontre de deux puissants faisceaux d'ondes électro-magnétiques.
L'imagination humaine se révèle, une fois encore, plus féconde pour découvrir des moyens de destruction que pour améliorer les conditions de vie de tant d'êtres misérables.
QUAND ARCHIMÈDE PIÉGEAIT LE SOLEIL
Selon la légende, c'est Archimède qui eut le premier cette idée de combattre un envahisseur, à coups de rayons. Le célèbre savant capta les rayons du soleil avec des batteries de miroirs et dirigea sur la flotte romaine, assiégeant Syracuse, ces redoutables faisceaux qui enflammèrent de nombreux navires. Depuis l'exploit d'Archimède, on chercha, à maintes reprises, le moyen d'obtenir des rayons qui ne dépendraient pas du soleil et pourraient être rassemblés en un pinceau invisible. Tous les tyrans et de nombreux romanciers ont rêvé de cette arme silencieuse qui porterait la mort instantanément à des dizaines de kilomètres.
On raconte que certain jour du mois d'août 1935, un convoi motorisé de la Wehrmacht s'immobilisa soudain sur une roule de Westphalie. Des experts allemands cherchèrent en vain les causes de cette étrange panne en série. On ne connut la vérité que beaucoup plus tard, quand un journal japonais de 1951 révéla que la spectaculaire paralysie des moteurs de la Wehrmacht avait été provoquée par... des spécialistes allemands qui effectuaient des essais d'émetteurs de faisceaux d'ondes électro-magnétiques. Il s'agissait bel et bien déjà d'expériences sur le rayon de la mort.
En 1941, on crut que les Anglais avaient trouvé, eux aussi, le rayon de la mort, car en l'espace de 48 heures, une vingtaine d'avions allemands furent contraints à des atterrissages forcés dans un rayon de 6 kilomètres autour de Goderville, près du Havre. Un de mes correspondants, qui fut témoin de ces faits, m'écrivit : « Les avions allaient heurter des haies et des clôtures, mais ne portaient aucune trace de balles. Les pilotes en sortaient, titubant comme des hommes ivres. Ils déclarèrent qu'ils ne comprenaient pas ce qui leur arrivait. »
LES SERVICES SECRETS SUR LE QUI-VIVE
Tous les services de contre-espionnage collectionnent ces informations sur des événements étranges qui présentent quelque ressemblance avec le rayon de la mort. Une pièce très importante manque à leurs dossiers ; c'est le compte rendu détaillé de l'expérience fameuse de Marconi.
Le 23 mai 1930, dans un laboratoire de Rome, Marconi reçoit un ami anglais. Vers la fin de leur entretien, le célèbre savant italien confie à son visiteur : « Je vais te dire quelque chose de très secret... La semaine dernière, j'ai expérimenté un petit appareil de mon invention. Dans un terrain vague derrière l'église San Stefano, j'ai réussi à émettre le rayon de la mort. A 40 mètres, ce rayon a tué deux chiens. » On ne sait pas exactement de quelle manière fut connu le secret de Marconi, car il est assuré que son ami anglais ne bavarda jamais à propos de cette confidence. Il semble que l'indiscrétion fut organisée par les services secrets italiens, dans l'intention de créer une crainte chez les adversaires éventuels de l'Italie. De toute façon, il est aujourd'hui évident que l'expérience de Marconi ne pouvait avoir une utilisation sur une grande échelle.
UN ACCIDENT A TOUT DÉCLENCHÉ
Personne, dans le monde scientifique, ne croyait qu'il serait possible de transporter par ondes assez d'énergie pour être à même d'incendier des avions ou de tuer des gens à plus de cinquante mètres de distance. Mais un jour, le 31 mai 1957, un accident survenu dans une station américaine de radars, allait modifier les convictions des savants. Un ouvrier qui était resté par inadvertance quelques secondes dans le champ d'un puissant radar, fut tué presque instantanément. Dès que la nouvelle de cet accident fut connue au Pentagone, ordre fut donné de mener une enquête approfondie sur les moindres détails de l'affaire. Le recueil des conclusions tirées par les experts fut reproduit en trente et un exemplaires, tous numérotés. On ne sait pas quels en furent les destinataires, car subitement le black-out fut ordonné.
Ce n'est que vingt et un mois plus tard qu'on put avoir vent d'un rebondissement. Nous sommes le 18 février 1959 ; il est sept heures du matin à Washington. La capitale des États-Unis s'éveille sous la neige. Deux sentinelles immobiles encadrent l'entrée numéro 3 du Secrétariat à la Défense. La consigne est stricte : vérifier minutieusement l'identité des gens qui doivent se présenter à partir de 7 heures 15. Ces gens sont investis de fonctions importantes, puisqu'il s'agit de membres de la « Commission de l'Espace ». Eux-mêmes ignorent pour quelles raisons on les a convoqués. À 7 heures 30, les portes de la salle de conférence sont fermées ; un homme monte à la tribune : c'est M. Johnson, directeur de la section des recherches avancées du Secrétariat à la Défense. Vingt-trois personnes seulement connaissent aujourd'hui dans le détail la communication ultra-secrète de M. Johnson. Mais, on sait pourtant qu'il s'agissait de l'effroyable rayon de la mort, qui serait capable de foudroyer les avions en plein vol.
LA FOUDRE DU PROFESSEUR BABAT
À peu près au même moment, des informations paraissaient dans la presse spécialisée de l'Union soviétique, concernant un « soleil artificiel » ou encore une « foudre artificielle ». En fait, dans les deux cas, le phénomène consiste à envoyer dans l'espace deux faisceaux d'ondes qui se rencontrent en un point où la quantité d'énergie transportée est telle qu'elle crée une énorme boule de feu. Cette invention du professeur Babat pourrait indifféremment servir à réchauffer l'atmosphère des villes situées dans les régions froides, ou à les incendier. Elle serait efficace, croit-on, pour allumer à distance des explosifs chimiques ou pour perturber des avions en plein vol.
Toutes ces informations, recueillies en compulsant des milliers de documents établissent que trois pays au moins détiendront sous peu une nouvelle « arme absolue » : l'infernal « Rayon de la Mort », qui mettra un point final à la folie qui s'est emparée du monde et des hommes.
"Jusqu'où ira la folie des hommes ? L'infernal « Rayon de la mort » va naître dans les laboratoires" par Lucien Barnier in Pilote n°35 du 23 juin 1960
"Jusqu'où ira la folie des hommes ? L'infernal « Rayon de la mort » va naître dans les laboratoires" par Lucien Barnier in Pilote n°35 du 23 juin 1960
"Tout a commencé par cet accident survenu dans une station américaine de radar. Un ouvrier stationnant dans le faisceau du radar, fut tué. L'idée du rayon de la mort fut aussitôt reprise..."
Commenter cet article